Le sentiment de culpabilité est fréquemment décrit comme « un malaise profond qui ronge de l’intérieur » ou « une tristesse accompagnée d’une dépréciation de soi » ou encore « des idées sombres qui tournent en boucle ». J’ai souvent été questionné sur le sujet lors de cours ou de retraites, mais il n’est pas simple d’apporter une réponse claire et simple à un ensemble d’émotions perturbatrices aussi complexe, d’autant plus qu’il y a fréquemment confusion entre honte et culpabilité, deux sentiments fréquemment associés. J’ai donc choisi d’écrire cet article en m’inspirant en grande partie des enseignements bouddhistes.
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Première possibilité : Vous êtes vraiment coupable
Notre existence en société est régie par différents référentiels qui orientent nos comportements et nous aident à bien vivre ensemble. La loi, les codes de conduite, les éthiques personnelles, les déontologies professionnelles et tout ce qui est généralement considéré comme moral ou immoral forment en nous, de façon plus ou moins conscientisée, un ensemble de référentiels auxquels nous nous efforçons plus ou moins d’adhérer.
Ces référentiels utilisent fréquemment la culpabilité comme moyen de pression psychologique, souvent assorti de sanctions, pour amener les personnes concernées à adopter les comportements voulus. Ces référentiels sont rarement explicités de façon très claire et exhaustive, ce qui laisse la place à de nombreuses interprétations et à de vaines culpabilisations. De nombreux référentiels existent, tous différemment interprétés par chacun et nous naviguons à vue au milieu de cette nébuleuse aux enjeux parfois majeurs. Autrement dit, face à cette masse diffuse d’injonctions, nous pouvons être dans la confusion.
Il arrive parfois que nous posions un acte verbal, physique ou mental répréhensible au regard d’un référentiel auquel nous adhérons ou auquel nous sommes soumis. Il est également possible que l’acte en question ait été cause de souffrance pour une ou plusieurs personnes ou pour des animaux. Nous pouvons alors ressentir, à bon escient, de la culpabilité. Nous sommes effectivement coupable d’avoir enfreint une loi, un aspect de notre discipline morale ou peut-être simplement d’avoir causé de la souffrance en étant sous l’emprise de la colère, de la jalousie ou d’une autre perturbation mentale.
À cette culpabilité, nous pouvons ajouter d’autres actes tels le mensonge, la dissimulation, le refoulement. Dans tous les cas, tant que cette culpabilité « factuelle » n’aura pas été examinée et « traitée », il subsistera dans notre esprit des traces de peur (de se faire démasquer ou de subir des représailles), de tension ou d’agitation.
Notez bien que cette culpabilité nous renvoie à notre responsabilité individuelle. Il est d’ailleurs avantageux d’utiliser la notion de responsabilité plutôt que celle, trop culturellement et socialement connotée de culpabilité. En matière de développement intérieur, les notions comptables et dualistes véhiculées par la culpabilité sont vaines. Il est en effet inutile de s’abandonner à un mental avide de spéculations stériles quant à la proportionnalité de la culpabilité par rapport aux faits ou à un certain romantisme malsain et autodestructeur de type « Je suis impardonnable ». Notre responsabilité est d’assumer le « règlement de la dette », de purifier notre esprit des négativités liées au passé, de renforcer notre discipline morale et d’évoluer spirituellement. Autrement dit, trêve de bavardages mentaux et agissons.
Solutions : Il est de notre responsabilité de tenter de réparer le mal causé à autrui lorsque cela est possible, de demander pardon, de regretter sincèrement, d’utiliser les méditations et pratiques de purification adaptées et enfin de se promettre de ne pas reproduire cette action. Cette expérience peut avantageusement être utilisée pour se grandir intérieurement et raviver son éthique. Notez bien qu’ici je vous encourage au regret sincère en ce qui concerne le passé et à la retenue en ce qui concerne l’avenir. Notez également que le regret de l’action passée n’est pas perturbant ni source de ruminations ou de tristesse ; il est purement vertueux et bienfaisant. Ce regret est clair et pleinement assumé. Il est encore plus bénéfique de l’exprimer.
Ce travail consiste en fait à se libérer du monde des émotions perturbatrices entretenues par le continuum mental et à évoluer vers un sentiment de responsabilité construit sur l’acceptation de ce qui est. Accepter le fait tel qu’il s’est produit c’est prendre acte de la réalité.
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Seconde possibilité : Votre culpabilité est purement virtuelle